LETTRES OUVERTES
Lettre à Thomas Mulcair
Dans le cadre des élections canadiennes qui se tiendront le lundi 19 octobre prochain, je viens d’adresser cette lettre à M. Thomas Mulcair, chef du Nouveau Parti démocratique.
Monsieur[1],
J’ai hésité avant de décider de voter Nouveau Parti démocratique (NPD) le 19 octobre. Quand j’ai reçu votre appel mécanisé, plus tôt cette semaine, je n’ai pu presser sur 1 pour vous confirmer mon appui. Je ne me sentais pas prête. Non parce que je ne partage pas vos convictions de gauche, mais par souci de cohérence : je suis indépendantiste. J’ai toutefois participé à la vague orange, lors du dernier scrutin, et contribué à faire élire Pierre Nantel dans Longueuil. Mon député n’a pas démérité, loin de là ! Cette fois, cependant, les arguments du Bloc québécois ont eu mon oreille attentive. Je souhaitais voter de manière conséquente : pour le Québec et pour la culture.
J’ai lu les journaux, suivi, un peu exaspérée, les débats en français et je viens de visionner la série de portraits d’Enquête (Radio-Canada) sur les trois candidats pressentis au poste de Premier Ministre. Je souhaite vivement voir M. Harper et le Parti Conservateur quitter le pouvoir. Ce n’est pas une raison suffisante, pour moi, de voter « stratégique » pour M. Trudeau, qui semble avoir le vent dans les voiles et en meilleure position peut-être pour mettre un terme au mandat du PC. Pour moi, le Parti Libéral c’est aussi la Loi des mesures de guerre, le scandale des commandites, les coupures à Radio-Canada, et j’en passe. Et quand Justin Trudeau affirme ne pas être politicien de carrière, ma foi, je peine à le croire. La politique n’est pas son métier ? Que fait-il là, alors? On ne décide pas du jour au lendemain de devenir chef d’un Parti comme le Parti Libéral et de briguer le poste de Premier Ministre. On se prépare! Je suis heureuse que le NPD nous offre cette fois une alternative sérieuse aux vieux partis.
Je vais voter pour vous, parce que vous avez le fort caractère que certains vous reprochent. N’en changez surtout pas. Pour vous aussi parce que vous avez une solide expérience de la politique, même si nous avons été dans des camps opposés au moment du référendum. Vous savez vous tenir debout et vous battre pour vos principes. Même si cela dérange. Vous paraissez intègre, pour ce que je peux en juger, et cela sur le long terme. Je vous reconnais une indéniable compétence pour mener les affaires de l’État.
Surtout, je vais voter aussi pour cette équipe, derrière vous. Ils ne lâchent pas, vos gens ! J’ai bien dû recevoir au moins 6 courriels par jour durant cette campagne, au moins trois appels téléphoniques en plus de la visite de bénévoles à la maison. C’était à la limite trop. Pourtant, en comparant avec le Bloc, à qui j’ai aussi manifesté de l’intérêt et de qui je n’ai rien reçu (ni courriel, ni demande de financement, ni appel, ni visite), force est de constater qu’il y a chez vous, outre un chef sur les tribunes, une équipe solide qui travaille d’arrache-pied sur le terrain. Je ne vais pas le leur reprocher: ils manquent sans doute de ressources. Mais, pour avoir suivi en campagne mon mari et les socialistes suisses (qui sont aussi en élection ce dimanche, d’ailleurs), je sais ce qu’il en coûte aux troupes comme aux candidats.
Bien sûr, vous pourrez compter sur moi lundi. De plus, je viens de vous adresser un deuxième don de 50 $. C’est peu, mais c’est de bon cœur, comme on dit. Enfin, je vais rendre publique cette lettre, sur mon site web et ma page Facebook, et inviter les gens qui me suivent à vous envoyer un don et à voter pour vous.
En retour, j’espère pouvoir compter sur vous et sur votre équipe du NPD pour défendre les causes qui me tiennent à coeur: le Québec bien sûr, l’environnement, les femmes, les autochtones, la culture. Sur ce dernier point, voyez plus large que la seule société Radio-Canada, le Conseil des arts et l’ONF : aidez aussi le livre et la lecture, par où tout commence.
Recevez, Monsieur, avec mes voeux de succès, mes salutations les plus cordiales,
Danielle Marcotte, écrivaine
[1] Québécoise, néanmoins veuve d’un maire et sénateur socialiste suisse, je sais que les socialistes se tutoient volontiers et s’appellent par leur prénom. Permettez tout de même que je vous vouvoie et vous dise « Monsieur ».
NOTE: Je me permets aussi de proposer un lien vers le site d’un amie et collègue écrivaine, Pauline Gélinas, qui poussait cette semaine un cri d’exaspération à l’égard de Stephen Harper.